Le pastel, or bleu du Pays de Cocagne.

LILI ROSE D'OCCITANIE


Atelier de peinture décorative au bleu de pastel

Exposition permanente : L'Art & la Matière, 5 place des Tisserands, 81100 BURLATS


"Pastel des teinturiers" par Matt Lavin from Bozeman, Montana, USA 

Pastel ? Vous avez dit...Pastel ? Comme les petits bâtons de couleurs ?
Pas du tout ! D'ailleurs chez nous, le pastel , c'est bleu. Du plus clair au plus foncé, soit, mais toujours bleu. Et pas n'importe quel bleu. Un bleu lumineux comme savent l'être les ciels du sud. C'est aussi un bleu solide, qui ne fane pas au soleil comme son rival d'hier, l’exotique indigo, de qualité moindre mais si peu cher qu'il le supplanta avant d'être à son tour remplacé par les colorants de synthèse.

Alors, le bleu de pastel, qu'es aquò ?

           Il s'agit d'un pigment bleu d'origine végétale, obtenu après broyage et fermentation des feuilles d'Ysatis tinctoria, autrement dit pastel des teinturiers. Cette plante tinctoriale qui donne un bleu exceptionnel a d'abord été cultivé en Picardie, au moyen âge, enrichissant considérablement la ville d'Amiens jusqu'à ce que la guerre de Cent ans ne fasse reculer sa culture plus au sud. Le terroir et le climat du Lauragais, en Occitanie, lui étant particulièrement favorable, le pastel des teinturiers y fut cultivé de façon intensive du douzième au dix-huitième siècle, dans une zone comprise entre Albi, Toulouse et carcassonne, un triangle d'or qui fit la fortune des négociants toulousains qui exportaient ce pigment dans toute l'Europe.

          L'or bleu permit un embellissement sans précédent de Toulouse qui vit s'édifier en ses murs des hôtels particuliers parmi les plus beaux de la Renaissance. Si vous passez par Toulouse, jetez un coup d’œil à ces merveilles architecturales que sont les hôtels d'Assezat et de Bernuy. Le négoce du pastel était à l'origine des fortunes colossales de leurs propriétaires, comment s'étonner alors que Jean de Bernuy put se porter caution de la rançon extraordinaire réclamée par Charles Quint pour la libération du roi de France François 1er, retenu prisonnier après la défaite de Pavie, en Italie. Songez donc, deux millions d’écus... Le pastel méritait bien le nom d'or bleu.
Hôtel d'Assezat, Toulouse.
          Sa fabrication s'étalait sur près de deux ans. Les feuilles de cette plante à la floraison jaune et vaporeuse étaient récoltées de la Saint Jean à la Toussaint, dés leur maturité, quand elles commençaient à jaunir, et portées au moulin pastellier. Elles y étaient broyées avec une meule de pierre jusqu'à l'obtention d'une pâte qu'on laissait fermenter durant deux mois. Cette pâte était ensuite façonnée à la main pour former des boules de la taille d'un pamplemousse qu'on laissait sécher pendant quatre mois. Ces boulettes de pastel déshydratées étaient ensuite vendues par les cultivateurs à des collecteurs locaux qui faisaient office d’intermédiaires avec les puissants marchands de pastel de Toulouse.
          Les marchands de pastel procédaient alors à l'agranage pour obtenir la matière tinctoriale  dite "agranat". Il s'agissait de granulés noirâtres qui, dans les cuves des teinturiers, permettaient de teindre les textiles en bleu. On pouvait obtenir toutes les nuances du bleu, du plus clair au plus foncé, et pour cela, il fallait procéder à des trempages successifs, deux au minimum pour obtenir la teinte la plus claire et jusqu'à cent pour avoir une teinte proche du noir. Le linge sorti de la cuve était d'abord verdâtre, et c'est au contact de l'air, par oxydation, que la magie du bleu opérait. Une fois bien oxydé, on retrempait le linge et on renouvelait l'opération jusqu'à l'obtention de la teinte désirée. Cerise sur le gâteau, le bleu de pastel ne déteignait pas et conservait sa couleur au fil du temps.
Et comme rien ne se perdait, l'écume bleue qui se formait à la surface des cuves des teinturiers, la "fleur de pastel", était récoltée pour fournir en pigment les enlumineurs. 
Par Daniel Gottfried Schreber

          En Occitanie, on nommait les boules de pastel séchées "coques" ou, en langue occitane, "cocas", et même"cocanhas", soit en français "cocagnes". Voici donc pourquoi, à la Renaissance, l'Occitanie allait donner naissance au fameux "Pays de Cocagne", synonyme de richesse et d'abondance.

          Puis les aléas de l'histoire, les guerres de religion, les mauvaises récoltes et surtout l'arrivée de l'indigo importé des Indes mirent un terme à l'ascension fulgurante des marchands de pastel.
Peu à peu, le pastel finit par disparaître, et la puissance des maîtres pastelliers avec.
          Cette culture emblématique du midi toulousain sombrera dans l'oubli jusqu'au vingtième siècle, période à laquelle, telle la Belle au Bois Dormant, la culture du pastel va sortir de son long sommeil pour connaitre une seconde vie.

          Depuis quelques années, on redécouvre en effet cette plante et ses vertus, pas seulement tinctoriales mais aussi médicinales. Si on continue à produire du pigment avec les feuilles de la rosette (sorte de couronne de feuilles au pied de la plante), on extrait aussi une huile extraordinaire de ses graines, réputée pour les soins de la peau, notamment en cas d’eczéma.

Champs de pastel des teinturiers (Ysatis tinctoria)


SHOPPING EN PAYS DE COCAGNE



MATHERA, 20 rue St Michel, 81170 CORDES SUR CIEL

Produits Beaux Arts, Textiles teints, Produits de soins pour la peau...
Essayez l'huile vierge de Pastel, une merveille...


L'ARTISAN PASTELLIER, 5 rue Puech Berenguier, 81000 ALBI

Produits Beaux Arts, Peintures pour la décoration, Vêtements...
Une envie de volets bleus ? L'authentique peinture de décoration au bleu de pastel vous y attend !


L'ART & LA MATIERE, 5 place des Tisserands, 81100 BURLATS

Association au service des Artisanats d'Art du Tarn et du savoir-faire français.
Une belle balade aux portes du Sidobre et du parc régional du Haut Languedoc...
Bijoux, Textile, Bois peint etc.



LA FERME AU VILLAGE, 4 place du Mercadial, 81440 LAUTREC

Produits du terroir, teinture au bleu de pastel... et l'ail de Lautrec !